Die Schönsten Schweizer Bücher

Le grand cru 2010 des livres suisses est présenté à la librairie du Centre culturel suisse à Paris. Pour la 6e année consécutive, cette librairie accueille les lauréats sélectionnés par un jury présidé par Cornel Windlin, et qui compte dans ses membres l’éditeur Lars Müller.
C’est en 1943 que s’ouvre le concours des plus beaux livres suisses, et ce n’est qu’en 1999 qu’il est organisé par l’Office fédéral de la culture. Ce concours récompense des ouvrages singuliers, du point de vue de leur fabrication (type de papier, reliure, impression), de leur contemporanéité, et de la qualité de la composition typographique apportée à la mise en pages.

Cette année, 19 livres ont été primés sur un total de 391 soumis au concours. Parmi les lauréats, on peut citer la graphiste formée à la Gerrit Rietveld Academie d’Amsterdam, Julia Born. Déjà primée dans ce concours (en 2007 pour OfOffJoff - One to One, et en 2008 pour An Ambiguous CaseCasco XI), membre du jury en 2006, Julia Born remporte cette année le prix Jan Tschichold, et se voit à nouveau primée pour Speaker – Receiver.

Avec sa couverture jaune et le titre rouge découpé en deux (Speaker devant et Receiver derrière), Julia Born fait du livre un véritable signal graphique ; ce signal émis entre le locuteur, le « speaker », ici Moyra Davey, et le destinataire, le « receiver », le lecteur. Le livre, créé comme le médiateur de cette relation offre un entretien avec l’artiste, un essai littéraire ainsi qu’une série de photographies.
La graphiste, pour qualifier sa méthode de travail (être toujours en étroite collaboration avec les auteurs), pourrait faire sienne cette phrase de Bruce Mau : « Cette nouvelle approche remplace la Division du travail par Synthèse, Clients et commissions par Collaborateurs et associés, Tâches d’exécution par Terrain de négociation, Rendement maximum par Feedback maximum, Forme appliquée au contenu par Forme et contenu évoluant en s’enrichissant l’un l’autre. » Il n’est plus question d’être concerté en fin de processus de recherche, mais d’être intégré dès le départ à ce dernier et ainsi l’infléchir, le développer, le transformer.

L’autre graphiste très remarquée en cette année 2011 est Ramaya Tegegne. Diplômée en 2008 de la Haute École d’art et de design (Head - Genève), cette jeune graphiste obtient les louanges de deux jurys : primée pour ce concours, son ouvrage TITLE remporte aussi la médaille d’argent du concours des plus beaux livres du monde entier.
TITLE représente l’aboutissement des recherches faites par Ramaya Tegegne sur la fonction du titre dans les œuvres d’art.
Son livre tend dans sa forme à l’essentiel : couverture rouge légèrement cartonnée sur laquelle est inscrit en lettres capitales blanches sans serif « TITLE », dans laquelle s’encartent des doubles-pages reproduites en noir et blanc, le tout relié par un simple élastique noir. Sur le fond, il explore l’aspect problématique et équivoque du titre.
Commençant par un texte de Roland Barthes questionnant la fonction de l’image (simple redondance du texte ou ajout pertinent d’information ?), le livre rassemble cent œuvres et unit singulièrement en un même espace les titres s’y rapportant. L’intelligence de la recherche se manifeste dès le choix de l’œuvre ouvrant le livre et de celle le refermant ; le sujet de ce livre y est tout entier contenu : Still Life du Caravage et A sheet of paper on which I was about to draw, as it slipped from my table and felt to the floor de Ryan Gander. Datant respectivement de 1598 et 2008, ces œuvres symbolisent une histoire du titre : Le Caravage peignant à une époque où la notion de titre était encore embryonnaire, et Ryan Gander créant dans un siècle qui ne cesse de la questionner.

Un cahier central propose des schémas, un index et les légendes des œuvres citées. Ces dernières sont parfois augmentées de citations des artistes à propos du titre. Pour n’en retenir qu’une : à la suite du titre L’Origine du monde, voici celle de Gustave Courbet : « Les titres n’ont jamais donné d’idée précise des objets. Si cela en avait été autrement, les œuvres seraient superflues. »
Finalement la boucle semble bouclée, le titre est voué à n’être que définitivement provisoire, s’inscrivant dans un mouvement perpétuel de « définitiation ».

L’exposition prend fin le 30 octobre mais les livres lauréats sont d’ores et déjà tous en vente, certains même sur le site du distributeur suisse Motto.

"Les plus beaux livres suisses", Centre culturel suisse, 32-38, rue des Francs-Bourgeois, Paris. Jusqu’au 30 octobre 2011.

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