Les années 50-60 connaissent l’âge d’or du livre. Âge d’or des techniques d’impression où la composition typographique au plomb côtoie avec naturel des impressions héliographiques d’un noir abyssal en regard de quelques notes de couleur apportées avec facilité par l’offset. À la croisée de ces chemins, la reproduction photographique noir et blanc dans l’édition papier atteint des sommets de qualité et de diffusion. Que demander de mieux pour nous faire voyager par l’image ?

L’alpinisme aristocratique redescend lui aussi de ses sommets pour nous faire profiter de ses trésors. L’alpinisme moderne, les récits d’explorations guidés par des Gaston Rébuffat, Roger Frison-Roche, Haroun Tazieff et autres conquérants de l’inutile, sublimés par les photographies de Pierre Tairraz, sont livrés à nos yeux par la volonté du jeune Benjamin Arthaud dirigeant sa nouvelle collection « Sempervivum » au sein de la maison familiale. À cette même génération, ce même modernisme, appartient Jean Rouch avec son destin africain.

Et pour ne pas citer qu’eux et rappeler que le Mont-Blanc sur-représenté par ces mêmes personnages sus-mentionnés ne doit pas être la montagne qui cache le massif, voici une petite marche d’approche avec ALPE ★ NEIGE ★ ROC – Revue Alpine Internationale.

Il faut saluer la beauté et la richesse de cette brève revue suisse tombée dans l’oubli. Face à cette fulgurance, deux revues historiques, véritables piliers Bonatti dans le champ de la revue alpine, alternant grandeur et décadence graphique sur un siècle d’existence : La Montagne revue d’exploration du Club Alpin Français et l’institutionnelle revue de recherche Revue de géographie alpine.

ALPE ★ NEIGE ★ ROC – Revue Alpine Internationale

Éditée bimensuellement par la librairie Marguerat à Lausanne entre 1951 et 1959, elle comporte 16 numéros sous cette forme, un grand format de 24x30cm. Une couverture souple cartonnée en dos carré-collé, papiers bouffants et papiers couchés, impressions offset et de nombreuses impressions noir et blanc en héliogravure se côtoient ici. Elle est dirigée par Charles Spillmann qui publie des textes de René Dittert, Frison-Roche, André Guex, Samivel, André Roch (également contributeurs réguliers des éditions Arthaud). Tout comme la revue La Montagne (qui semble avoir forgé le genre), la revue alpine se caractérise par des récits d’alpinistes, de voyages et d’ascensions, de la science et du folklore.

Revue de Géographie Alpine

Créée en 1913 par le géographe français Raoul Blanchard, La Revue de Géographie Alpine – Journal of Alpine Research est une revue internationale et pluridisciplinaire. Elle publie en français et en anglais des articles scientifiques inédits concernant les problématiques territoriales et environnementales sur l’Arc alpin et les montagnes d’Europe – « les autres montagnes du monde peuvent prendre place dans des numéros thématiques à orientation comparative », dixit Persee dont provient ce petit historique de façade (la plupart des numéros depuis sa naissance sont consultables ici). On notera l’invariable et imperturbable ligne graphique du périodique entre 1913 et 1959. Entre revue et cahier de recherche, on ne peut pas faire plus efficace que ces couvertures/sommaires/colophons qui semblent avoir marqué profondément le genre du rendu de recherche scientifique. Depuis 1968, c’est l’Association de Géographie Alpine, liée à l’Institut de géographie alpine et hébergée par l’Université Grenoble-I, qui dirige la rédaction.

Ski sports d’hiver

Petit interlude avec un peu de folie des années 30 (1932-1935), ce bref éclair intensément coloré confirmant que quelques modestes titres, en électrons libres, ont souvent beaucoup apporté au paysage des revues alpines.

La Montagne

Créées par le Club Alpin Français en 1905, deux publications – le Bulletin Trimestriel et l’Annuaire – vont être réunies dans une seule revue se voulant mensuelle : La Montagne. Selon le Comité de rédaction, avec Maurice Paillon comme rédacteur en chef, il fallait conserver les contributions à caractère scientifique, littéraire ou culturel de la conception traditionnelle, tout en s’ouvrant peu à peu aux promoteurs de l’alpinisme sportif…

La confrontation entre ces deux conceptions – pas toujours à fleurets mouchetés — continuera pendant de nombreuses années… L’ambition était de « maintenir la tradition d’un passé qui mérite le respect et développer le caractère universel de la publication » pour permettre l’émergence d’une pluralité de points de vue… » dixit Le Club Alpin Français dont le très intéressant historique de leurs publications est consultable ici. Sur 110 ans d’existence, La Montagne s’affirme comme le témoin privilégié de l’évolution fluctuante du graphisme, des techniques d’impressions, des goûts et des choix éditoriaux.

---