En 1954 alors que le Black Mountain College est largement endetté et déserté, son directeur, le poète Charles Olson (1910-1970), parvient à créer la revue The Black Mountain Review en débloquant, grâce à sa force de persuasion, 500 précieux dollars par numéro. Son septième et dernier opus paraîtra en 1957, après l’extinction définitive du collège. Cette publication périodique non académique fut « comme toutes les petites revues dignes de cette appellation : déficitaire, moderniste, non-pérenne, et peu diffusée » (Rachel Stella).
Le premier numéro de la revue est dirigé par Robert Creeley (1926-2005). Il est mis en page et imprimé aux Baléares à Majorque, où vit le poète américain.
The Black Mountain Review était « un lieu que notre activité définissait et que nous construisions ensemble – un lieu où nous pouvions faire la preuve de ce que nous, en tant qu’écrivains, estimions significatif, aussi bien à nos propres yeux que pour le monde dans lequel nous espérions que nos écrits entreraient. Nous nous sentions tous très loin des revues conventionnelles de l’époque. »(Robert Creeley)
La composition géométrique visible sur la couverture des quatre premiers numéros de la revue est signée par Kitasono Katue, pseudonyme de Hashimoto Kentichi (1902-1978). Cet artiste et poète ayant contribué à la diffusion de Dada et du surréalisme au Japon éditait lui-même une fameuse revue d’avant-garde : VOU.
« Dans une vraie revue d’avant-garde tout le monde écrit et personne n’est simplement lecteur. » Rachel Stella
En 1955, Kitasono Katue cesse de collaborer avec The Black Mountain Review. Robert Creeley repense alors sa maquette. La revue passe d’un format de 64 pages in quarto (16,4 x 21,5 cm) à un volume de 224 pages de plus petit format (12,5 x 17 cm). Le titre et le numéro n’apparaissent plus qu’au dos de la revue – choix radical pour l’époque. La première de couverture laisse dorénavant toute sa place à l’œuvre d’un artiste expressionniste abstrait. C’est ainsi une toile de John Altoon qui sera reproduite en une du cinquième numéro, daté de l’été 1955.
Une œuvre de Dan Rice, ancien assistant de Mark Rothko, étudiant devenu professeur dans les derniers jours du Black Mountain College, fait la une du n° 6 (printemps 1956).
La dernière couverture (automne 1957) est signée Edward Corbett, un artiste abstrait de San Francisco. C’est le fameux numéro « Beat » de la Black Mountain Review : on y lit des poèmes de Ginsberg, Kerouac, Whalen, McClure, Burroughs ou encore de Snyder.
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POUR ALLER PLUS LOIN :
Rachel Stella, « Black Mountain Review : un non lieu mythique », La Revue des Revues 44, automne 2010.