Radical Software (1970-1974)
Aux sources de la vidéo portable, artistique et politique

Portfolio réalisé par Nolwenn Maudet.

Faire un journal pour discuter de vidéo, telle était l’ambition de Radical Software. Au tournant des années 1970, le matériel vidéo commence à devenir abordable et les artistes se passionnent pour la dimension sociale et politique du médium. Beryl Korot et Phyllis Gershuny, deux pionnières américaines de l’art vidéo, lancent le premier numéro de la revue en juin 1970. Plus que sur les productions vidéo elles-mêmes, la revue se concentre sur les enjeux et processus explorés par les artistes.

Extrait du premier édito, dont la thématique fait largement écho aux problématiques numériques actuelles [trad. de l’auteur] :

“Le pouvoir ne se mesure plus en terres, travail ou capital, mais en accès à l’information et aux moyens de sa dissémination. Tant que les plus puissants outils (hormis les armes) sont entre les mains de ceux qui les accaparent, aucune vision culturelle alternative ne peut percer.

À moins que nous ne concevions et implémentions des structures d’information alternatives qui transcendent et reconfigurent celles qui existent, tous autres styles de vie et systèmes alternatifs ne seront rien de plus que les produits des processus existants.

Heureusement, de nouveaux outils suggèrent de nouveaux usages, en particulier à ceux qui ne sont pas satisfaits des usages que l’on fait des anciens outils.

Nous ne sommes pas une version informatisée d’une quelconque culture idéale corrompue du début du XXe siècle, mais une toute nouvelle société, car nous sommes informatisés [computerized]. La télévision n’est pas simplement un meilleur moyen de transmettre l’ancienne culture, c’est un élément pour en fonder une nouvelle.

Notre espèce ne survivra pas en rejetant totalement, ni en embrassant totalement la technologie, mais en l’humanisant, en permettant aux gens d’accéder aux outils d’information dont ils ont besoin pour façonner et reprendre le contrôle de leurs vies. [...]

Regardez les systèmes de communication de masse autres que le téléphone : ils sont non seulement contrôlés de manière centralisée mais le processus de prise de décision est également lié à des institutions plus qu’à des personnes.

Heureusement, cependant, la tendance va vers un plus grand accès à toutes les technologies à travers une réduction de la taille et du coût. [...] La cassette vidéo peut être à la télévision ce que l’écriture est au langage. Et la télévision, en retour, a englobé le langage écrit en tant que moyen de communication dominant à l’échelle du globe.

VTR : Video Tape Recorder [ndlt].

Bientôt, les cassettes vidéos et les systèmes VTR feront des réseaux alternatifs une réalité.

Ceux d’entre nous qui créent leur propre télévision savent que le médium peut être bien plus qu’une “radio avec un écran” telle qu’elle est encore utilisée par les réseaux qui renforcent les notions dépassées de point focal fixe, de point de vue, de thème, de sujet, affirmant leur propre passivité et la nôtre, nous livrant un retour de retour [feedback of feedback] d’information au lieu d’affirmer l’immédiateté implicite de la vidéo, nous immunisant contre l’impact de l’information en nous demandant d’anticiper ce qui peut déjà être anticipé - des reportages sur le Vietnam diffusés au moment du diner aux shows en série au format unique. Si l’information est notre environnement, pourquoi notre environnement n’est-il pas considéré en tant qu’information ?”



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POUR ALLER PLUS LOIN :

Une archive numérique du magazine est disponible en ligne. On y trouve en français quelques articles de contextualisation, ainsi que des textes d’introduction résumant chacun des onze numéros.

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