Impression 3d ou Fabrication additive
De quoi parle-t-on ?

Auteur de l’article et de l’infographie : Anne-Lise Rias. Creative commons.

En technique comme dans d’autres domaines les mots comptent. L’expression que l’on choisit, Impression 3d ou Fabrication Additive, peut indiquer certes notre niveau d’expertise du domaine mais surtout notre motivation, en tant que designers, à nous approprier les techniques.

L’expression Impression 3d, c’est d’abord une traduction directe de 3D printing, une appellation américaine déposée par 3D systems. Elle est la plupart du temps utilisée pour parler de productions faites par le procédé Dépôt de filament, avec les petites machines que l’on a maintenant sur le coin du bureau. Mais aussi parfois pour désigner indifféremment la Stéréolithographie ou le Frittage de poudre par laser. Or, le sens strict de 3D printing désigne précisément le procédé Projection de liant sur poudre. Celui-ci est basé sur l’utilisation de cartouches qui projettent des encres et de la colle sur un support blanc, d’où la proximité avec l’impression 2d sur papier bien connue qui a facilement glissé, en français, vers Impression 3d.

D’un point de vue sémantique, utiliser Impression 3d c’est ignorer les discussions européennes et américaines qui ont produit les normes NF E 67-001 et ISO/ASTM52900-15.

➊ Kruth JP., Leu MC., Nakagawa T. "Progress in Additive Manufacturing and Rapid Prototyping." 1998. ➋ AFNOR. "Nf E 67-001." edited by Union de Normalisation de la Mécanique, 2011. ➌ Wohlers Associates., ed. Additive Manufacturing and 3d Printing State of the Industry. Annual Worldwide Progress Report, 2013. ➍ Obaton A-F., Bernard A., Taillandier G., Moschetta J-M.,. "Fabrication Additive : État De L’art Et Besoins Métrologiques Engendrés." Revue française de métrologie, 2015-1, n° 37 (2015).

La littérature proposait, au fil des développements techniques, diverses catégorisations, selon la nature des matériaux utilisés, la nature de la source d’énergie employée ou le type de transformation appliquée [Kruth, 1998] . Pour harmoniser vocabulaire et définitions, ces normes regroupent maintenant “l’ensemble des procédés permettant de fabriquer couche par couche, par ajout de matière, un objet physique à partir d’un objet numérique” [AFNOR, 2011] en 7 catégories (voir infographie ci-après). L’appellation de chaque procédé reste encore variable. Nombreuses sont propriétés d’entreprises privées et communiquées en anglais [Wohlers, 2013] [Obaton, 2015] . La traduction laissant une liberté d’interprétation, le choix d’un intitulé est fortement lié à la compréhension de la technique en elle-même. S’ils veulent plonger cerveau et mains dans les procédés, il reste une opportunité pour les designers de participer à la définition des techniques pour se les approprier.

Avant la diffusion d’Impression 3d, les communications au grand public accompagnaient les premiers développements, surtout visibles aux États-Unis. Simplifier Fabrication Additive en Impression 3d serait utile pour vulgariser les techniques ? Effectivement, l’impression 3d est maintenant familière dans le langage et dans la pratique d’un public large, des professionnels aux makers.

➎ Bourell D., Beaman J., Leu M., Rosen D. "A Brief History of Additive Manufacturing and the 2009 Roadmap for Additive Manufacturing : Looking Back and Looking Ahead." Paper presented at the RapidTech 2009, 2009.

Mais utiliser Impression 3d c’est méconnaître les solides racines historiques qui puisent dans la topographie et la photosculpture du XIXe siècle (voir infographie), la vingtaine de brevets déposés uniquement sur le fonctionnement des procédés eux-mêmes [Bourell, 2009] et trente ans d’applications industrielles.

Utiliser Impression 3d c’est aussi focaliser sur une portion réduite à 20% du panel des procédés (voir infographie). D’un point de vue de designer, ce focus invisibilise une partie des possibilités, par exemple la fabrication en métal avec le procédé de Fusion par laser pour réaliser non pas des prototypes mais des produits finis. Cela défavorise aussi la prise en compte des dernières améliorations techniques (rapidité, fiabilité, coûts, disponibilité des matériaux...) qui font que la fabrication par ajout de couches atteint une productivité à l’échelle de la série industrielle. Fabrication Additive permet aux designers industriels d’explorer une nouvelle grammaire formelle et fonctionnelle.

Autrement dit, dans une attitude de designer, Impression 3d c’est limiter la créativité tandis que Fabrication Additive c’est se confronter aux techniques et s’approprier une palette très large de possibilités.


Les procédés de fabrication additive

Classification des procédés de Fabrication Additive disponibles sur le marché, depuis les fondements du XIXe jusqu’aux procédés commercialisés en 2010. Cette infographie vise à relativiser l’emploi de Impression 3d au profit de Fabrication Additive pour décrire justement la diversité des techniques disponibles.


1 à 7 : les classes de procédés définies par les normes. Les appellations sont des propositions faites à partir d’une pratique personnelle de designer intégré dans le monde de la Fabrication Additive industrielle.


Depuis 2010


De 2000 à 2010



De 1990 à 2000



Avant 1990


Au XIXe siècle



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